La COP15 Désertification qui s’est tenue pendant deux semaines en Côte d’Ivoire s’est achevée vendredi 20 mai, avec parmi les points saillants, la restauration d’un milliard d’hectares de terres dégradées d’ici à 2030. Mais sur la sécheresse, qui affecte de façon très sévère la Corne de l’Afrique, la mise en place d’un protocole contraignant a été écarté. La COP15 Désertification est la première des trois COP de la Convention de Rio à se tenir cette année, avant la COP Biodiversité prévue en Chine cet été et celle sur le climat prévue en Égypte en novembre.
Pas moins de 38 décisions ont été adoptées pendant la COP15 Désertification, qui s’est achevée à Abidjan, en Côte d’Ivoire, vendredi 20 mai dans la soirée. Parmi les engagements les plus saillants, il y a notamment l’objectif de restauration d’un milliard d’hectares de terres dégradées d’ici à 2030. Les 196 États membres se sont également accordés pour lutter contre la migration et les déplacements provoqués par la désertification en créant des opportunités sociales et économiques. La participation des femmes à la gestion des terres a également été au centre des discussions. Mais sur la sécheresse, un sujet primordial alors qu’une personne meurt toutes les 48 secondes de faim en Afrique de l’Est, le consensus n’a pas émergé.
Plusieurs pays, africains notamment, plaidaient pour un protocole contraignant ajouté à la convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification (CNULCD) sur le modèle du protocole de Kyoto sur les émissions de gaz à effet de serre. Mais ils ont essuyé le refus de certaines délégations occidentales et notamment des Américains. À la place, un groupe de travail intergouvernemental sur la sécheresse pour 2022-2024 va être mis en place “afin d’examiner les instruments politiques mondiaux et les cadres politiques régionaux, pour soutenir le passage d’une gestion réactive à une gestion proactive de la sécheresse“, explique la déclaration finale.
128 pays engagés sur un objectif de dégradation neutre des terres
La COP Désertification a été créée à l’occasion du sommet de Rio en 1992, en même temps que les deux autres conventions, davantage connues, consacrées au changement climatique et à la biodiversité. Elle vise à lutter contre la désertification, qui affecte déjà 40 % des terres émergées, contre 25 % en 2017, selon un nouveau bilan. 128 États sont engagés sur un objectif de dégradation neutre des terres d’ici 2030, qui est aussi l’un 17 objectifs de développement durable (ODD) adoptés en 2015. Cela signifie par exemple que pour construire un entrepôt, l’équivalent devra être restauré à l’échelle du territoire, à défaut d’avoir pu éviter cette dégradation.
Trois indicateurs sont ciblés : la productivité primaire, c’est-à-dire la biomasse produite sur un territoire (arbres, cultures, pastoralisme, etc.). Le deuxième critère concerne le couvert végétal et enfin le dernier s’intéresse au stockage de CO2 dans les sols. “Tous les deux ans, les États rapportent toutes les actions mises en place au sein de ce cadre. Ils vont par exemple produire une carte de l’état de leurs sols, et des territoires à restaurer en priorité”, explique Jean-Luc Chotte, directeur de Recherche à l’IRD (Institut de recherche pour le développement) et président du Comité Scientifique Français de la Désertification.
“L’agroécologie comme levier essentiel, c’est acquis”
Présent sur place à Abidjan depuis le début de la conférence, il tire un bilan positif de ces deux semaines, auxquelles ont participé 7000 personnes. “Il y a beaucoup d’interactivité, d’implication et de mobilisation. Il y a énormément d’initiatives sur le terrain“, explique le scientifique qui a travaillé pendant plusieurs semaines avec la délégation française pour préparer ce rendez-vous essentiel. “Le sujet progresse. Une journée entière a par exemple été consacrée à l’agroécologie comme levier essentiel, c’est acquis. Pour la première fois aussi, une journée complète a été dédiée à la Grande muraille verte (projet qui vise à restaurer 100 millions d’hectares sur une ceinture allant du Sénégal à la Somalie, ndr)“, ajoute-t-il.
Pourtant, la médiatisation autour de cette COP15 Désertification est très faible. Or, la dégradation des terres ne cesse de progresser, les sécheresses sont de plus en plus intenses et fréquentes et ne touchent pas que les pays du Sud. La majorité de la France par exemple est menacée de sécheresse cet été, selon une nouvelle publication du ministère de la Transition écologique. La qualité des terres est en outre étroitement liée à la sécurité alimentaire, au bien-être humain, à la préservation de la biodiversité ou encore à la lutte contre le changement climatique. “Nous allons nous pencher sérieusement sur le sujet“, reconnaît un porte-parole d’une ONG française, spécialisée dans l’environnement, qui n’était pas à la COP15. La prochaine COP Désertification se tiendra en Arabie Saoudite en 2024.
NVTC