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Téranga Nature

COP15 BIODIVERSITÉ : UN ACCORD SEMBLE ENCORE BIEN LOIN

COP15 BIODIVERSITÉ : UN ACCORD SEMBLE ENCORE BIEN LOIN

Après deux années de réunions virtuelles, les 196 États membres de la Convention pour la diversité biologique (CDB) de l’ONU se sont retrouvés à Genève fin mars afin d’avancer sur le cadre mondial post-2020 pour lutter contre l’érosion de la biodiversité. Celui-ci devra être adopté à la COP15 Biodiversité, qui devrait se tenir fin août-début septembre en Chine, après avoir déjà été reportée quatre fois. Mais pour l’instant, aucun consensus n’émerge. 

Le texte ressemble aujourd’hui à un arbre de Noël où chacun a accroché sa décoration” résume ironiquement Basile Van Havre, l’un des deux co-présidents du groupe de travail chargé de la rédaction du futur cadre mondial pour la biodiversité à l’horizon 2050. C’est le résultat de quinze jours d’échanges en présentiel à Genève entre les 196 États membres de la Convention pour la diversité biologique de l’ONU. “J’avais sous-estimé le besoin des parties à s’exprimer après deux années d’interruption, ce qui nous a fait perdre beaucoup de temps” explique-t-il.  

“Les négociations de Genève ont été une sorte de rappel à la réalité où chacun a mis sa position sur la table pour de vrai. C’est la première chose à faire avant de négocier mais cela a laissé moins de temps pour avancer avec un résultat très mitigé puisque beaucoup de propositions sont entre parenthèses et qu’il va falloir les trancher avant la COP15 Biodiversité en Chine”, résume Sylvie Lemmet, ambassadrice française pour l’environnement. “Les objectifs chiffrés ont disparu, il n’y a pas d’accord non plus sur les objectifs intermédiaires à 2030 et il y a beaucoup de méfiance sur les solutions fondées sur la nature“, énumère-t-elle.

“Nous sommes habitués à soigner un patient très malade en lui mettant des pansements”

Face à cet échec, un nouveau rendez-vous a été pris fin juin à Nairobi, au Kenya, afin de trouver un accord avant la COP15 de Kunming, qui pourrait se tenir fin août-début septembre, les dates officielles n’ayant toujours pas été annoncées par Pékin. L’objectif le plus emblématique du cadre est la protection de 30 % des terres et des océans d’ici à 2030 au niveau mondial, contre 17% de la surface terrestre et 7 % des zones marines et côtières en 2020. L’objectif est désormais soutenu par plus de 90 pays. Mais l’Afrique du Sud et la Chine, pays hôtes de la COP15, seraient frileux, et le Brésil défendrait l’idée d’une cible nationale plutôt que mondiale.  

En début d’année, une cinquantaine de chercheurs ont publié un rapport sur cette augmentation des aires protégées. “Si elle est bien faite, elle peut être très importante, mais elle reste largement insuffisante pour stopper la perte de biodiversité“, avertit Paul Leadley, co-auteur du rapport. Les chercheurs insistent sur la nécessité de “changements transformateurs” dans l’agriculture, la chasse, la pêche et l’importance de limiter le réchauffement climatique. Ils appellent aussi à arrêter les subventions néfastes pour la biodiversité. “Nous sommes habitués à soigner un patient très malade en lui mettant des pansements. Il faut arrêter“, dit Paul Leadley.  

Plus récemment, à l’occasion des 30 ans du réseau Natura 2000, plusieurs ONG ont aussi déploré une “véritable course à la désignation de nouvelles aires protégées, au détriment de la mise en place de mesures de gestion appropriées“. “Seuls 4 % des aires marines protégées disposent aujourd’hui d’une protection forte, contre un objectif de 10% qui devait être atteint en 2022“, a déclaré Elodie Martinie-Cousty, de France Nature Environnement. Les autres aires classées “sont très peu protégées et pâtissent des conséquences de la surpêche et des techniques de pêche destructrices“, a-t-elle aussi déploré.  

Une instrumentalisation des pays les moins ambitieux ?

Là où les discussions ont achoppé, ce sont sur les financements. Lors de la plénière de clôture, le Gabon, représentant le groupe africain, l’Inde, le Pakistan, le Brésil et d’autres pays d’Amérique latine ont demandé aux pays développés “au moins 100 milliards de dollars par an dans un premier temps, puis 700 milliards de dollars par an d’ici 2030 et au-delà” pour les pays en développement, contre 200 milliards prévus dans le document de travail. De quoi bloquer potentiellement les discussions. 

“J’espère que ce n’est pas une instrumentalisation de la part de certains pays qui n’auraient pas envie d’un accord ambitieux. C’est mon inquiétude à ce jour”, admet Sylvie Lemmet. “Pour dépasser ce blocage, il faut d’urgence un processus pour instaurer la confiance” d’ici à la COP15, commente l’ONG Avaaz, qui s’interroge, comme beaucoup d’observateurs, sur la discrétion de la présidence chinoise. Si Pékin n’en veut plus, elle “devrait la confier à quelqu’un d’autre. Nous ne pouvons plus attendre”, lance-t-elle. 

AFP