Dans l’extrême sud du Chili, les glaciers sont un “indicateur par excellence” des effets du réchauffement climatique, rappellent les scientifiques.
Une fissure barre le glacier San Rafael et un iceberg haut comme un immeuble de dix étages s’effondre dans le lac. Une centaine d’icebergs flottent à la surface du lac San Rafael, situé dans la région d’Aysen, à 1.700 km au sud de Santiago. Il y a 150 ans, le glacier du même nom couvrait deux tiers du lac. Il a désormais reculé de 11 km à l’intérieur de la vallée et n’est plus visible sur le lac. Au total 39 glaciers composent le Campo de Hielo Norte (Champ de glace nord de Patagonie), qui forme avec le Campo de Hierlo Sur (Champ de glace sud) la troisième plus grande masse de glace du monde après l’Antarctique et le Groenland, selon les scientifiques chiliens.
La fonte des glaciers est un phénomène naturel que le changement climatique accélère de manière “significative”, rappelle à l’AFP Jorge O’Kuinghttons, chef de l’Unité régionale de glaciologie à la Direction général des eaux (DGA).”Les glaciers sont un indicateur par excellence du changement climatique”, souligne Alexis Segovia, 42 ans, un autre chercheur de cette unité. Il rappelle que le phénomène constaté dans la région d’Aysen est visible dans la quasi-totalité des 26.000 glaciers du Chili : seuls deux ont augmenté de surface. Des données confirmées par l’Agence spatiale européenne, selon laquelle les glaciers de la Patagonie, à la fois au Chili et en Argentine, reculent plus vite que n’importe où ailleurs dans le monde. Alexis Segovia souligne aussi qu’il s’agit d’un cercle vicieux car les surfaces glacées “renvoient une grande quantité des radiations qui arrivent sur la Terre”. Si cette surface continue à se réduire, la planète “va se réchauffer plus vite”.
Autre signe, l’inondation de zones qui auparavant n’étaient pas touchées par le phénomène. “La chute d’icebergs génère une immense inondation appelée inondation par débordement de lac glaciaire”, explique Jorge O’Kuinghttons. “Des secteurs sont inondés qui ne l’étaient pas auparavant”, l’eau grossissant les fleuves de la région et pouvant affecter les zones urbaines et infrastructures situées plus en aval.
Sur un autre lac de la région, le lac General Carrera, deuxième lac d’Amérique du Sud, que se partagent le Chili et l’Argentine, Santos Catalan, qui gagne sa vie en élevant vaches et moutons, navigue quotidiennement à bord d’une barque sur les eaux d’un fjord dominé par le glacier Cordon Contreras. Il gagne ainsi un complément d’argent grâce au transport des touristes. Le sexagénaire est le témoin des changements qui s’opèrent : “Il y a quinze ou vingt ans, il a commencé à neiger très peu et cela fond de plus en plus car la chaleur est très forte”, dit-il, à la barre du bateau. A tout moment, “un effondrement de glace peut se produire et tout balayer”, prévient le marin, qui vit ce changement en première ligne.
Géo
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